ORDINAIRE 30 A

« Quel est le grand commandement ? »

(Mat 22, 34-40)

Jésus a parlé en paraboles. Le voici interpellé sur ses convictions et sa vie spirituelle. La pièce de monnaie romaine a resitué les choses et rétabli les équilibres. Le voici interrogé sur la Loi et les commandements. Veut-on vraiment le prendre en défaut ? Le prophète tombera-t-il sur des questions ‘religieuses’ ? On sait combien la Loi tient une place centrale dans la foi d’Israël et son rôle de canalisateur. Elle oriente et fait vivre. Elle établit le peuple et illumine sa foi. La Loi est divine car, venant de Dieu, elle dirige les cœurs vers Lui. Dieu dévoile son identité en exigeant, par sa Loi, un amour sans partage. Les commandements viennent élever le croyant dans sa quête et dans sa relation à Dieu. Suivre les commandements signifie aimer Dieu et le suivre dans la diversité des possibles. Jésus a compris la visée de Dieu : aimer rapproche de Dieu car il n’est qu’amour et l’amour est la voie de la connaissance et de la relation. Aimer Dieu de toutes ses forces, c’est entrer dans une relation dynamique et véridique, sans compromis, sans idolâtrie, sans partage. L’amour nous plonge dans la vérité et la lumière.

  1. 1. Aimer Dieu.

Le commandement de l’amour concerne Dieu. Le Dieu de la révélation n’est pas un dieu local ou parmi d’autres, il est le Dieu Unique qui n’a d’autre Nom qu’Amour. Même s’il a fallu des siècles pour le comprendre ou s’il a fallu passer par des choix, le Dieu d’Abraham est le vrai Dieu, le Dieu des prophètes est le Dieu unique, le Dieu de Jésus-Christ est le Dieu Un et Trine. L’aimer est notre seul devoir religieux. L’aimer est notre voie de connaissance. L’aimer est participation à la communion éternelle. Aimer Dieu est une aventure quotidienne qui nous introduit dans la vérité éternelle.

Aimer le Fils : c’est Jésus qui est la voie d’accès à Dieu. Il nous a enseigné la vérité et l’a vécue le premier. Jésus est l’Homme de Nazareth qui a partagé notre humanité, notre frère, notre ami. Jésus est le Fils qui s’est incarné, a changé notre existence, a touché notre être. Le Christ est la seule voie et la seule vérité car venant de Dieu, il va vers Dieu. Fils de Dieu, il parle en connaissance. Fils du Père, il dévoile la communion trinitaire et donne l’Esprit. Aimer Dieu, c’est aimer le Fils qui nous l’a révélé.

Aimer le Père : c’est le Père qui est l’objet de notre amour. Ce même Dieu de l’Ancien Testament, le voici découvert, compris, dévoilé dans le Nouveau Testament par la lumière de Pâques. La longue pédagogie divine d’enseignement prend toute sa dimension dans la Résurrection du Fils. Oui, Dieu est Père et notre relation est filiale. Dieu est Père et notre devoir est de l’aimer. Dieu est Père et l’amour est son Nom. Aimer le Père c’est vivre et exister, c’est devenir nous-mêmes, c’est plonger dans la lumière. Aimer le Père c’est partager les relations trinitaires, c’est entrer dans le Royaume. Aimer le Père, c’est suivre le Christ et vivre de cette relation intrinsèque et existentielle qui caractérise le Fils par le Père dans l’Esprit.

Aimer l’Esprit : l’Esprit est le lien d’amour entre le Père et le Fils. Personne divine, il partage la vie trinitaire. Il est donné comme un don de vie et de lumière. Il est celui qui crée, qui révèle, qui purifie, qui prie et qui aime en nous. Révélateur du Fils, il le suit durant sa vie et le garde uni au Père. Révélateur du Père, il dévoile la vérité et permet la communion. Amour, il unit le Père et le Fils, Dieu et sa créature, le Père et ses enfants, les hommes entre eux. Centre d’unité, il prend soin de la différence et anime l’Eglise en la plongeant dans le mystère et la vérité. L’Esprit est l’âme de la vie spirituelle et de la communion. Aimer l’Esprit, c’est aimer l’unité et tendre vers la communion, c’est aimer Dieu dans le dynamisme de la créativité, de la nouveauté et de la découverte.

On le voit, la tradition biblique nous invite à découvrir Celui qui se révèle dans la vie d’Israël et la vie de Jésus. Découvrir pour mieux aimer et aimer pour vivre. Le Dieu qui veut se révéler est celui qui aime et demande de l’aimer. Les relations ne sont plus uniquement religieuses, elles sont existentielles et essentielles, vitales et profondes. L’amour est l’unique chemin qui conduit vers Dieu et l’unique voie pour partager l’Être du Dieu d’amour. Aimer, c’est la vérité de notre vie et la consistance de notre existence. Car aimer est la vie même de la Sainte Trinité.

  1. 2. Aimer son prochain comme soi-même.

Peut-on aimer Dieu et haïr son prochain ou tout au moins lui être indifférent ? Il semble que non. Jésus fait coïncider l’amour de Dieu et l’amour du prochain. Il révèle ainsi les vraies relations qui président à la vie interpersonnelle et donc sociale ou communautaire. Il ne s’agit pas d’aimer parce que c’est mieux pour la vie sociale, il s’agit de se compromettre et de s’engager envers l’autre dans la fragilité de son existence et la vérité de son être. Il s’agit de découvrir en l’autre un frère ou une sœur et de partager notre amour. Aimer l’autre est alors la seule voie possible pour accéder à Dieu.

S’aimer soi-même : le « comme soi-même » est bien caractéristique. Il vient de Jésus. Peut-on aimer quand on se hait, quand on se dévalorise ou on se renie ? L’amour de soi est un équilibre nécessaire à l’amour de l’autre. Loin de tout égoïsme ou égocentrisme, l’amour de soi est une école de vérité et un tremplin vers l’autre. En acceptant ses limites et ses faiblesses, en acceptant ses forces et ses capacités, on est plus à même d’accepter les faiblesses et les capacités des autres, d’accepter de faire un bout de chemin ensemble et de découvrir une Présence aimante en nous. Se savoir fils ou fille du Père nous donne cette force intérieure d’équilibre et de liberté car l’amour relève et fait vivre.

Aimer l’autre : l’autre n’est pas d’abord mon ennemi, il est mon frère, ma sœur, mon semblable. Même si les relations sont tumultueuses, elles s’apaisent dans le pardon et la compassion. Elles s’approfondissent en chemin de vie et de vérité. L’autre est le chemin donné par Dieu pour le découvrir Lui. L’autre est celui qui purifie mes illusions et qui m’enracine dans la vérité et l’amour. Aimer l’autre n’a rien de mielleux ou de niais, c’est parfois une souffrance qui met en lumière le bien et le beau. Aimer l’autre me pousse dans mes retranchements et mes limites. Aimer c’est accepter la beauté en l’autre et la mettre en avant.

  1. 3. Conclusion : l’amour nous caractérise.

Le Christ invite à l’amour dans la longue tradition biblique : amour de Dieu et du prochain.

Le Christ invite à trouver le Père dans l’amour car Dieu ne se trouve que dans l’amour.

Le Christ invite à aimer le prochain qui est chemin vers Dieu.

Le Christ nous invite à aimer car l’amour est la vérité de notre être. Créés dans l’amour, nous vivons d’amour. Sauvés par l’amour, nous rejoignons l’amour éternel, le Dieu Trinité, amour communion.

Père Francis

 

This entry was posted in 2014, Année A, Français, Ordinaire II, Père Francis. Bookmark the permalink.