ORDINAIRE 17 B

« A la vue de signe que Jésus avait accompli… »

(Jean 6, 1-15)

Jean aime parler de signe et non de miracle. Le miracle nous émerveille mais nous distrait. Il s’arrête au merveilleux et à son aspect matériel. Certes, ceci est important. Jean voit un signe dans les gestes deJésus, c’est-à-dire un sens, un appel, une orientation. Le miracle interpelle mais le signe approfondit. Le miracle expose, le signe impose du sens, de l’énergie, de la vie. Le miracle réjouit, le signe donne la grâce et la paix. Si Jésus est un thaumaturge, il est avant tout le Fils, le Signe du Père pour nous, le Souffle de l’Esprit en nous, la force de la Trinité. Les gens s’arrêtent à l’intérêt qu’ils peuvent tirer du miracle. Jésus indique un chemin fait de signes mais aussi de conversion, de sacrifices et de joie. Il s’agit de découvrir une Présence aimante en nous qui oriente notre vie et nous procure la paix et le bonheur, à travers les difficultés et les angoisses du quotidien. Même si la vie n’est pas facile, elle n’en reste pas moins le lieu de notre croissance, de notre élévation, de la rencontre. Sur ce chemin caillouteux et broussailleux, il y a le Christ qui nous tient la main et qui nous emmène vers le Père par l’Esprit. Pour cela, il se fait nourriture et dynamisme.

  1. 1. Le signe du pain.

La multiplication des pains est un signe manifeste de la providence du Père par son Fils envoyé pour être notre nourriture et notre force. Dieu nourrit son peuple, on l’a vu dans le désert et au cours de toute l’aventure biblique. Il donne surtout son Fils qui se fait pain pour que le chemin se fasse plus lumineux et se dirige vers la vérité. Jésus qui multiplie le pain, est avant tout Pain de vie.

Dieu nourrit son peuple : l’Ancien Testament a retenu les interventions de Dieu pour son Peuple.  Quand celui-ci appelle, Dieu répond. Il n’est jamais indifférent aux misères et aux épreuves que vit son Peuple. Il ira jusqu’au miracle : la manne, les cailles, le pain… On retient cette sollicitude qui s’accomplira parfaitement en Christ. Ceci dit, il n’y a jamais passivité du Peuple mais participation et foi. Dieu peut-il accomplir un miracle, peut-il intervenir si notre cœur ne se tourne pas vers lui ?

Dieu nourrit parfaitement son peuple : l’Ancien testament mais aussi le Nouveau Testament témoignent d’un fait important : le don de Dieu est parfait et complet. Le corps est nourri mais aussi le cœur et l’esprit. Toute la personne est sauvée comme toute la personne est nourrie. Remplir l’estomac n’est pas suffisant. Il y a bien plus important : un cœur à combler, un esprit à dynamiser, une âme à aimer. C’est pourquoi le miracle devient signe pour qu’il dépasse sa matérialité et qu’il touche les cœurs. Dieu donne sa Loi. Ses Commandements sont nourriture pour l’esprit. La prière est communion pour l’âme. Sa présence aimante est joie pour le cœur. Sinon Dieu resterait une idole à satisfaire et son peuple, un peuple d’esclaves à soumettre. Ainsi, le Dieu de la Bible pourvoit à satisfaire son Peuple à tous niveaux.

Dieu nourrit son peuple par son Fils : le Nouveau Testament fait un pas de plus puisqu’il relate la mission du Fils, le salut obtenu par lui et la communion vécue en lui. Jésus vient satisfaire nos besoins les plus profonds, celles qui concernent l’âme et le cœur. Ces besoins qui nous poussent à des gestes insensés, à des actions surprenantes, à des situations non-concluantes. Il y a en nous une poussée vers le haut, un désir profond de vérité et de profondeur, un dynamisme de vie, une énergie vitale qui nous maintient. Cela s’exprime par les arts et la beauté mais aussi par des choix moins glorieux qui, au lieu de refléter la lumière s’enténèbrent et se perdent. Le Fils, qui nous connaît par Création et qui nous touche par Incarnation, peut répondre à cet élan en désignant le mal mais surtout en montrant le bien et le beau, en rétablissant l’harmonie et l’équilibre, en éclairant et en donnant du sens. Le Fils seul peut satisfaire l’être humain dans ses aspirations les plus profondes et les plus nobles. Le Fils seul peut guérir l’être humain dans ses bassesses les plus folles et les plus perverses.

Jésus, Pain de vie : le Fils nourrit mais se fait nourriture pour nous. Non seulement il nourrit les aspirations de l’être humain mais il se donne en nourriture à l’être humain pour communier à la divinité et participer de la gloire éternelle. En mangeant le Corps du Fils de Dieu, la boucle est bouclée : Dieu se fait nourriture pour nous nourrir de vie éternelle. Non seulement il répond à nos besoins (Ancien Testament) et à nos aspirations les plus profondes (Nouveau Testament) mais encore il se donne en nourriture pour irriguer nos personnes de vie éternelle et faire de nous des fils/filles participants de sa divinité.

Le miracle de Jésus s’inscrit dans la tradition biblique : Dieu nourrit son peuple. Il dépasse aussi cette tradition biblique en touchant les profondeurs de l’être de l’homme et en y insufflant la vie et l’amour. Jésus, vraie nourriture et vraie boisson, nous obtient ainsi la vie divine.

  1. 2. Le signe de l’amour.

Les signes de Dieu sont expressions de son amour pour nous. Il nous aime et nous le redit constamment. Il nous aime et nous le montre par Jésus son Fils dans l’Esprit. L’Esprit est donné pour vivre de cet amour et pour participer de l’amour trinitaire. Dès maintenant, nous sommes en communion. Dès maintenant, la vie éternelle est commencée.

Amour trinitaire : le Dieu unique est amour, il est donc Trinité, communion de Personnes Divines. On le sait à travers la mission et l’être de Jésus. On peut recueillir tous les signes disséminés dans la Bible et les relire comme on peut relire l’histoire fabuleuse de la création. On y verra l’amour inconditionnel de Dieu pour sa créature dont il accorde la filiation. Les signes sont donc les signes de son amour. Le miracle y participe mais ne s’arrête pas à son aspect merveilleux. C’est toute la Trinité qui aime et inspire, qui agit et qui sauve, qui accueille et qui partage.

Amour trinitaire des autres : le Dieu unique veut être aimé à travers les autres. Comment aimer Dieu qu’on ne voit pas et haïr les autres qu’on voit ? C’est bien là le drame religieux qui se perd dans l’invisible sans s’arrêter au visible alors que le christianisme est un saut dans l’invisible à travers les signes sensibles et visibles qui nous l’indiquent. L’incarnation est le chemin choisi par le Fils. Les sacrements, signes visibles et efficaces, sont la matière qui nous plonge dans le mystère. Les frères et sœurs sont les êtres à aimer en Dieu. Toute la Trinité aime et est aimée par l’amour pour les autres dont nous sommes capables.

  1. 3. Conclusion : grâce à un jeune garçon !

Jésus accomplit le miracle grâce à un jeune garçon. Il était là avec ses pains et poissons. Il a aidé Jésus à révéler son être et son intention.

Jésus nous nourrit de son propre Corps pour que nous goûtions à l’amour trinitaire qui est communion éternelle et partage. Tous, nous y sommes appelés. Tous, c’est dire: tous ensemble.

Père Francis

 

This entry was posted in 2015, Année B, Français, Ordinaire II, Père Francis. Bookmark the permalink.