ORDINAIRE 25 B

« Le serviteur de tous »

(Marc 9, 30-37)

Jésus monte à Jérusalem. Il traverse la Palestine. Ses rencontres sont des moments d’enseignement et de grande humanité. Il traverse les régions en proclamant la Parole de Dieu, le Règne qui vient, l’amour du Père. Il sait que son œuvre est contestée et que sa mission souffrira d’incompréhension. Il accepte la controverse et même l’affrontement avec les autorités religieuses. Il se situe au niveau religieux sans jamais entrer dans le domaine politique, même si on l’y forcera. Ces disciples ne comprennent pas bien cette mission. Ils en sont toujours à considérer la venue du Messie comme un événement politico-religieux qui mettra fin à l’occupation romaine et qui établira le Règne de Dieu de façon concrète, visible, peut-être violente. Jésus les emmène vers d’autres cieux, d’autres pensées, d’autres considérations. Il les veut prêts pour la bataille finale, pour l’affrontement spirituel, celui entre le bien et le mal, entre le péché et la grâce, entre la vie et la mort. Sa mission est de servir et non d’asservir, de révéler et non d’écraser, de pardonner et non de condamner. L’exemple de l’enfant sera un signe pour les apôtres. Le service est la volonté de Dieu.

  1. 1. Jésus, le Serviteur de Dieu.

Jésus ne voulait pas de règne terrestre, il est roi. Il ne voulait pas dominer, il est maître de l’univers. Il ne voulait pas changer le culte ou la loi, il est le culte nouveau et la Loi nouvelle. Jésus voulait révéler le Père et son amour, c’est par la croix, sa mort et sa Résurrection que la révélation se fera de façon éclatante. Jésus est venu pour servir ce Dieu saint qui se laisse entrevoir et qui se reflètera sur son visage de Crucifié et de Ressuscité. Le service est la voie choisie par Jésus pour connaître Dieu et révéler son Visage.

Serviteur souffrant : la figure du Serviteur souffrant, venant d’Isaïe, nous effraie un peu. On n’aime pas souffrir, et c’est normal. On est fait pour la joie et la vie. La souffrance fait pourtant partie de la vie, elle permet souvent une croissance, un développement, un changement. Elle nous recentre sur l’essentiel. Elle nous rappelle notre finitude et nos limites. De façon négative, elle nous déconcerte et nous éprouve. De façon positive, elle nous annonce le changement et la métamorphose. Elle revalorise la vie et l’amour. Elle purifie nos relations et nos tourments. Jésus, en souffrant, fait la volonté de Dieu, non pas que Dieu veuille à tout prix la souffrance du Christ. Dieu veut le salut des hommes et leur bonheur. Jésus va prendre tout sur lui pour permettre à cette volonté de s’accomplir. La souffrance vient donc du mal qui s’est déversée sur le monde par le péché et la rupture d’Alliance. « Il fallait que le Christ souffrît » pour que le salut fût possible et que le mal, le péché et la mort fussent éliminés. Ce mystère nous plonge dans l’identité de Dieu et dans sa volonté suprême de nous sauver. La communion est possible maintenant et la relation rétablie par le Christ. Jésus le Christ est donc ce Serviteur souffrant mis en lumière lors de la Passion et Crucifixion.

Serviteur aimant : le serviteur ne peut servir « efficacement » que s’il aime. Il n’y a en Jésus ni servilité, ni soumission. Le service est comme naturel. Il fait partie de lui. C’est sa façon d’être et d’être au monde. Sa façon de vivre. Y aurait-il ici un appel anthropologique, un éclairage sur notre être-homme ? Ce qui est certain pour nous, selon les Évangiles, c’est que le Christ a pris cette voie, jusqu’à la limite de l’esclavage. Le serviteur prend la dernière place, celle de l’esclave qui sert sans discuter. Mais ce « doux esclavage » est vécu dans l’amour et c’est ce qui en fait une voie de vie. Le service fait partie de la personne du Christ. Son être-messie, son être-sauveur et même son être-Fils s’en ressentent. C’est en accomplissant la volonté du Père qu’il est Fils et qu’il devient homme. La volonté de Dieu est révélatrice de l’identité du Fils et donc dévoile quelque chose du divin, au-delà de nos définitions et catégories philosophiques.

Serviteur, Fils du Père : on connaît Jésus par sa mission. Son identité se révèlent dans sa Passion /Résurrection. Sa Personne de Verbe fait chair ouvre les portes du Ciel. On connaît Dieu par Lui et ce Dieu est Père, Fils et Saint Esprit. Le Dieu Un est aussi le Dieu Trine. Si le service a pu nous conduire à cette connaissance et donc à cette grâce participante, c’est qu’il est essentiel à notre vie. Si le service a permis d’entrer dans le mystère trinitaire, c’est que c’est la voie qui nous est laissée en héritage. C’est la voie qui identifie notre filiation, notre être-fils et filles en Christ. La voie que l’Esprit développe dans les charismes ecclésiaux et particuliers. La voie de la sagesse et de la justice. La voie du chemin économique et politique au service de l’humanité.

Alors que Jésus avance vers Jérusalem, il révèle son identité de Messie et de Sauveur.  Au-delà des idées partisanes ou des idéologies, il se montre Serviteur et vit en Serviteur. Le service n’est pas un choix, il est une voie vers Dieu pour le connaître et entrer en communion. Peut-on dire que c’est la voie unique qui incombe au chrétien qui se dit fils/fille du Père ?

  1. 2. Les serviteurs de Dieu.

Notre maître est serviteur. Notre roi est serviteur. Mon Seigneur est serviteur. Peut-on oublier que le service est notre chemin pour suivre le Christ ? C’est si clair qu’on ne peut tergiverser. Il y a ici quelque chose de l’être-chrétien qui touche l’identité et la communion. A nous maintenant de servir pour que le Règne de Dieu s’établisse et que la vie surgisse là où elle est menacée.

Serviteurs comme le Christ : « autres christs » par notre baptême, nous sommes identifiés au Fils. Nous avons « revêtus le Christ ». Nous portons sa « bonne odeur » de par le monde comme le Saint Chrême est parfumé pour notre consécration. Pas de doute, si le Christ est serviteur, nous le sommes. Si le Christ est le Fils, nous sommes fils et filles du Père en lui par l’Esprit Saint.

Serviteurs du Père : « fils/filles dans le Fils », nous avons accès au Père de par sa volonté et le service du Christ. La Résurrection nous a rendu dignes et aptes à la communion. C’est dans le service du Père, dans l’amour, que nous exerçons notre ministère (service) et notre devoir de louange.

Serviteurs des autres : « aimer les autres » est la voie royale du service car en les aimant, on aime Dieu. On aime Dieu et donc on aime les autres. Pas de contradiction dans l’amour. C’est le même amour qui s’exprime, la même communion qui se vit.

  1. 3. Conclusion : servir en aimant.

Jésus est le Serviteur souffrant. Le péché a fait que son service a accepté la souffrance et l’a assumée.

Jésus est le vrai Serviteur du Père. C’est sa façon de vivre humainement son identité divine.

Jésus est la voie qui nous invite au service. En aimant, nous répondons à notre vocation de fils et filles du Père. Nous entrons dans cette relation filiale qui s’épanouira dans la contemplation éternelle et le partage de l’amour trinitaire.

P. Francis

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