ORDINAIRE 4 C

« Le message de grâce qui sortait de sa bouche »

(Luc 4, 21-30)

Un silence suit la lecture du prophète Isaïe dans la synagogue de Nazareth. Jésus a déposé le rouleau et on attend sa parole. Ce silence est plein d’attente. Silence respectueux qui attend un mot de confort, de bénédiction, de compassion…de grâce. Silence agressif qui attend le dérapage, la contradiction, une raison pour s’affronter. Le silence est généreux mais peut être aussi pesant et lourd de conséquences. Alors Jésus parle. Sa parole porte. Elle touche par sa précision et sa vérité. Elle conforte et éclaire mais aussi met le doigt sur les inconséquences des auditeurs. On accepte ou on refuse. On accueille la vérité ou on la rejette. On reconnaît l’orateur ou on le renie. Ainsi en est-il de Jésus tout au long de sa vie. Sa parole est grâce pour les cœurs ouverts à l’amour, à la lumière. Elle est glaive pour ceux qui veulent battre le fer, qui se ferment ou se renferment dans leurs certitudes. Jésus est par lui-même Parole de Dieu, Verbe éternel. Sa parole est Parole et ne laisse donc pas indifférent. Sa parole devient grâce car la Parole de Dieu est Grâce. Nous aussi, nous nous mettons à l’écoute. Souvent, nous accueillons pacifiquement ces mots de grâce et de lumière. Parfois, nous nous fermons à la Parole et donc à la grâce venant d’en-haut, jusqu’à la violence. Une attente sereine et confiante est la meilleure attitude. La Parole fait son chemin en nos cœurs. La grâce est donnée. Avec elle, vie et vérité, lumière et beauté, paix et justice. Jésus le Fils est grâce pour le monde.

  1. 1. Quand la grâce pacifie

Ne sommes-nous pas en recherche d’une parole de vérité ou du moins d’une parole donnant du sens à nos existences ? Dans la confusion des mots vides et des discours creux, nous reconnaissons que certains ont une parole qui porte et qui illumine nos vies. Ces personnes sont les prophètes, les spirituels, les saints, les sages. Mais il y a surtout Celui qui est à l’origine de tout et qui sonde nos cœurs et nos reins, qui touche nos cœurs et notre être, qui sait et qui communique, qui se communique. Dieu est Logos et donc Parole. Son Fils est le Verbe qui crée, harmonise, donne sens et consacre. Par son Incarnation, le Fils a rejoint notre réalité : le Verbe s’est donc incarné. Par sa Croix, le Fils a tranché dans le vif : le Verbe a détruit le péché et la mort. Par sa Résurrection, le Fils a transfiguré l’univers et a fait de nous des fils/filles : le Verbe nous a introduits dans la communion trinitaire. La Parole est Grâce.

La Parole rejoint nos cœurs : parce que Créateur, Dieu connaît la nature humaine. Il sait ce dont nous avons besoin parce que sa volonté est claire et créative. Quand Jésus parle, il exprime l’amour du Père et suscite l’Esprit en nous. Il nous rejoint car il connaît le cœur de l’homme. Il sait que plus que les besoins matériels, ce sont les aspirations spirituelles qui nous occupent, c’est l’amour que nous recherchons, c’est l’harmonie à laquelle nous aspirons. Sa Parole résonne en nous comme elle résonne dans l’univers et quand le cosmos trouve harmonie et sérénité, nous trouvons paix et joie.

La Parole touche nos âmes : parce que Saint, Dieu parle à notre âme. Il sait que nous nous savons mortels et pourtant désireux d’immortalité. L’âme n’est pas un ‘esprit errant’ ni une parcelle du divin prisonnière de la matière. Elle fait partie de nous, elle est nous-même dans l’harmonie complète de la personne humaine. Elle aspire de toutes ses forces à la transcendance, à la hauteur, à la vie, à l’éternité. Le Fils parle et l’âme entend. Elle comprend et se met à son école. Elle s’unit à lui pour entrer dans la vie éternelle. Elle dépasse les clivages limités pour l’infini de la Parole éternelle.

La Parole pacifie nos corps : parce que Esprit, Dieu sanctifie nos corps et du coup toutes nos valeurs humaines. Ce corps si décrié ou tant idolâtré, ce corps si faible mais si grand, capable du pire mais destiné à la beauté, corps voulu et béni pour être chemin vers Dieu, par création mais surtout par l’Incarnation du Fils et la force sanctificatrice de la Résurrection. Jésus le Christ rétablit l’harmonie de la personne humaine, destinée toute entière au salut et donc à l’immortalité. Par sa Parole, Dieu crée et recrée, il attire à lui toute la création, purifiée et bénite.

Le Verbe de Dieu a su nous montrer la vérité du Père et l’amour dans l’Esprit Saint. Il restaure les relations par ses paroles de grâce et ses gestes de vie. Il pacifie le cœur, l’âme et le corps de l’homme. Il rétablit la personne humaine dans sa vérité et son harmonie.

  1. 2. Quand la grâce dérange

Il est certain que nous avons des résistances. Nous ne sommes pas prêts à cette évolution car nous entretenons parfois des zones d’ombres et nous nous y complaisons. Même si nos cœurs aspirent à la beauté, nous choisissons la laideur. Nos limites nous plaisent et sont parfois objets de revendication. Nos limites ne sont pas un obstacle quand elles se vivent dans la vérité et l’accueil de la grâce. Le péché, quant à lui, tue la relation et  détruit la paix car il engage la liberté. Le désir se pervertit pour s’ériger en idole ou en temple de l’orgueil.

La Parole dénonce le péché : la Parole met le doigt sur nos errances et notre dévoiement. Elle dénonce nos fausses libertés et les chemins sans issue que nous prenons orgueilleusement. Elle fait mal car elle a raison. Elle suscite notre violence car elle touche les fibres de notre âme en attente d’amour mais enténébrée. Accueillie, la Parole procure le pardon et rétablit l’harmonie. La grâce surabonde là où le péché abonde. L’opération est parfois douloureuse mais elle est nécessaire. Il n’y a que les larmes pour accueillir la miséricorde et s’engager dans le pur amour.

La Parole éclaire nos compromis : la Parole dévoile nos compromis et dénonce nos compromissions. Elle n’est pas mielleuse et ne cherche pas à embellir la laideur ou la tiédeur. Elle tranche et rappelle la vérité. Ceci est bien différent de la recherche sincère du vrai, qui est un chemin de connaissance par la conscience. Ceci est plutôt le dérapage, la dérive, l’accord tendancieux, la démission… pour faire ‘moderne’, pour une paix douteuse, pour la mode, pour l’arrangement à l’amiable. La Parole est entière : vérité, elle donne la lumière ; vie, elle donne sens ; éternelle, elle élève le fini et les limites.

  1. 3. Conclusion : l’état de grâce !

Jésus, dans la synagogue de Nazareth, ne prend pas de gants. Il dit ce que la Parole dit. Il fait ce que la Parole propose. Il s’engage parce qu’il est la Parole, le Verbe de Dieu. S’il tranche, c’est à cause du péché ou des compromis que nous avons intellectualisés et acceptés.

Jésus, le Verbe, n’exprime que la Volonté de Dieu et cette volonté est grâce pour le monde. La parole devient source de grâce et introduit dans la Grâce, la Présence de Dieu, la joie de la relation, la vérité, la communion en la Trinité. « Aujourd’hui, cette parole se réalise » nous dit-il !

P. Francis

 

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