ORDINAIRE 24 C

« Cet homme fait bon accueil aux pécheurs »

(Luc 15, 1-32)

Jésus ne laisse pas de surprendre. Alors qu’il s’avance peu-à-peu vers la cité sainte et qu’il entrera dans le Temple, signe de la Présence Divine, il s’approche des gens et touche les cœurs. Il sait parler à la conscience et se fait comprendre par ses paraboles. Certes on savait que Dieu était miséricordieux, qu’il pardonnait le péché de son peuple, qu’il se penchait vers ses fils ‘avec des entrailles de mère’. L’Ancien Testament regorge d’exemples de pardon et de compassion. Mais avec Jésus, cette dimension prend une ampleur inégalée. La miséricorde est comme un second nom pour Dieu. Elle le caractérise comme un père, comme une mère, comme le Dieu de la Révélation. Dieu n’attend rien en retour sinon notre amour et la vie en plénitude. Il nous donne sa force et nous remet sur pieds. Il est prêt à partir à la recherche de la brebis perdue, laissant tout et risquant tout. Il est prêt à mettre de l’ordre dans le désordre de nos vies et de l’harmonie dans la cacophonie de notre existence. Embués par bien des choses inutiles et des pensées puériles, nous ne voyons pas toujours la main tendue, le cœur ouvert, le Royaume proposé. Nous sommes fils et filles de la lumière si nous acceptons de vivre dans la liberté des enfants de Dieu et la joie de l’Esprit Saint pour la plus grande gloire de la Sainte Trinité.

  1. 1. Le pardon de Dieu.

On reproche à Jésus d’être trop proche de Dieu qu’il appelle « Père ». On lui reproche de prétendre à une relation particulière avec le Créateur et même de se faire son égal. On lui reprochera d’être trop miséricordieux et de révéler une miséricorde qui dépasse les limites acceptables. Mais en effet, Dieu est sans limite et donc son amour est sans limite, tout comme sa miséricorde et son pardon. Voici une bonne nouvelle pour nous qui désespérons de grandir et qui quémandons souvent indulgence et compréhension. Au-delà de nos espérances, le Père nous redit son amour, toujours et toujours.

Dieu nous recherche : Dieu part à la recherche de chacun de nous. Il ne se fatigue pas de nous chercher et de nous poursuivre, jusque dans les recoins les moins inavouables de nos vies. Cette lumière qui éclaire l’univers et fait briller les étoiles est pour nous. Sa Lumière nous illumine pour comprendre, apprendre et agir, pour aimer et se laisser aimer. L’Écriture est pleine de cette recherche, de ce mouvement incessant de sortie de soi, de proposition, d’Alliance. Depuis notre sortie symbolique du Jardin d’Eden, Dieu nous accompagne et nous redit sa confiance et son estime. Il viendra lui-même paître son troupeau, panser la brebis blessée, reconstruire l’enclos, guider vers les verts pâturages. L’histoire religieuse de humanité pourrait pratiquement être résumée à cette quête divine : non pas l’homme qui scrute l’univers et qui cherche l’Être Suprême mais un Dieu qui se penche et propose son amour par une Alliance éternelle. Cette Alliance prendra toute sa grandeur sur la croix du Christ, celui qui nous indique le Ciel et qui va jusqu’au bout de l’amour.

Dieu nous réconforte : Dieu réconforte sa créature par son pardon et son adoption. Cette créature est si faible, facilement tentée, aisément pécheresse. Elle s’enfonce dans l’orgueil et l’égoïsme. Elle prétend être sa propre source et pouvoir naviguer toute seule dans l’océan qui l’entoure. Pourtant, elle sait bien qu’elle ne peut rien, qu’elle n’est que poussière dans cet univers si vaste et si merveilleux, qu’un rien l’anéantit et qu’un rhume la paralyse.  Dieu, comme un Père, vient nous consoler et nous mettre en garde. Le pardon nous relève et nous ouvre un avenir. Il est la grâce qui agit en nous et nous consolide. De fait, le pardon nous ouvre à la filiation. Non seulement nous sommes consolés mais aussi élevés au niveau de Dieu et régénérés en lui. Le Père, par le Fils, dans l’Esprit nous octroie une identité que nous ne pouvions même pas rêver, celle de fils/filles. Le pardon prend une dimension identitaire et profonde. Il nous prépare à plus grand, à plus beau, à l’impensable : à la communion trinitaire !

Dieu nous aime : alors que nous cherchons l’amour de toutes nos forces et par tous les moyens, il nous est donné gratuitement et pleinement. A un niveau inégalé, divin. Nos amours humaines sont élevées au niveau de Dieu, transfigurées. L’amour divin passe par nos efforts et notre bonne volonté, par l’intermédiaire de notre humanité et de notre chair. Sinon, il risque l’illusion ou paraitrait impossible. Qui en effet peut atteindre l’amour de Dieu ? Si Dieu nous aime, alors l’amour devient possible, avec ce que nous sommes et par ce que nous sommes. Grand risque, peut-être, mais chemin de liberté qui passe par la croix et s’épanouit dans la joie pascale.

Les 3 paraboles du jour nous instruisent sur la bonté du Père, sa sollicitude envers nous et sa compassion. Elles nous révèlent un Dieu chercheur et aimant, un Dieu qui ne se lasse pas de nous aimer.

  1. 2. La compassion

Si Dieu est si compatissant, ne devons-nous pas l’être en retour ? La compassion est expression de la miséricorde. C’est se laisser émouvoir par la détresse de l’autre, se laisser toucher aux entrailles par le malheur et la pauvreté, se laisser entraîner à aimer. Dieu nous entoure de compassion et cet amour est grandissant pour le pécheur qui se détruit et se meurt.

Puissance miséricordieuse : la puissance de Dieu, c’est sa miséricorde. On a longtemps eu peur du divin, ne sachant comment l’apprivoiser. En Christ, le divin prend visage, le visage d’un Père, un Père plein de tendresse, une tendresse éternelle qui ouvre à la communion. Cette miséricorde est pardon quand nécessaire et délicatesse quand le cœur est ouvert. Cette miséricorde est festive quand le pécheur revient, quand la brebis est retrouvée, quand la table est mise.

Puissance exigeante : la miséricorde de Dieu est exigeante car elle touche notre être et le sens de notre existence. Exigeante de vérité et de douceur car la tendresse n’est pas faiblesse. Exigeante car elle nous pousse à cette même miséricorde. Comment garder pour soi une si bonne nouvelle et ne pas partager la beauté d’une relation filiale ? L’amour infini du Père nous rend adultes dans la foi, vrais dans l’espérance et puissants dans l’amour. Rien ne résiste à la tendresse !

  1. 3. Conclusion : l’amour nous précède

Jésus nous rappelle combien nous sommes aimés et combien nous comptons pour le Père. Cet amour nous accorde pardon et vie nouvelle. Il nous transforme du dedans pour accéder à la stature de fils/fille.

Jésus nous rappelle combien Dieu est miséricordieux et combien il ne cesse de pardonner et relever. Cette miséricorde est profonde et contagieuse. Nous ne pouvons que la transmettre car celui qui y a goûté veut la partager avec ses frères. La compassion devient chemin vers Dieu et chemin vers les autres. Elle ouvre le Ciel et y prépare la fête éternelle de l’amour partagé.

P. Francis

 

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