EPIPHANIE

« Nous avons vu se lever son étoile »

(Mat 2, 1-12)

Pendant le temps de Noël, une cascade de fêtes nous réjouit. Le mystère est si grand qu’il nous faut prendre le temps d’en recevoir tous les aspects et d’en percevoir toutes les conséquences. Il n’est pas rien que Dieu vienne parmi nous, par l’incarnation. De même, il n’est pas évident que l’éternité se soumette au temps ou que l’infini se concentre dans la finitude de notre chair. Si Jésus est vraiment le Fils de Dieu, Dieu bouleverse toutes nos catégories philosophiques et théologiques pour nous rejoindre. Il le peut parce qu’il est Dieu. Il le veut parce qu’il est amour. Cette incarnation est une épiphanie, la révélation de ce qu’il est en vérité et de sa volonté. L’amour est à l’origine de tout mais l’amour est aussi la fin de toute chose. Cette fête de l’Epiphanie vient nous rejoindre dans nos certitudes et nous invite une fois de plus  au dépassement et à l’accueil de la nouveauté. Par Jésus, Dieu se manifeste à toutes les nations et étend son amour à tous les peuples sans exception. Le salut est accordé à tous et la communion est possible pour tous. L’amour s’est manifesté à Noël, il se déverse sur toute la création. Pâques fera la pleine lumière sur cette réalité qui s’entrevoit à Bethléem. La grâce est accordée à tous !

  1. 1. Révélation de Dieu

On est étonné quelque fois du temps qu’il a fallu pour avoir une idée, bien limitée il est vrai, de qui est Dieu. Serions-nous parvenus à une réflexion si haute sans révélation ? Les étapes successives de la révélation auront été nécessaires pour ‘recevoir’ et ‘intégrer’ la grandeur et la profondeur de ce qui nous est donné. D’Abraham à Moïse et les prophètes et jusqu’à Marie de Nazareth, le chemin est lumineux. La venue du messie est fondamentale et vient compléter le tableau écrit d’en haut.

Un Dieu grand : Benoît XVI dirait que Dieu a pu se faire petit justement parce qu’il est grand. Il est le Créateur et les univers sont au creux de sa main. S’il a initié toute chose, il en contrôle la réalisation. Toutes les références ‘cosmiques’ autour de Noël (étoile, lumière…) veulent signifier que toute la création participe à l’événement. Nous sommes liés d’une certaine façon avec cet univers et nos liens sont existentiels. Les différents ‘règnes’ (animal, végétale, minéral) s’orientent vers la même pleine réalisation en Christ. L’irruption du divin dans notre création n’a pas fini de nous étonner. L’Epiphanie est révélation de cette grande unité et de cette dépendance d’origine.

Un Dieu proche : si Dieu est le Créateur, il n’en reste pas moins proche du créé. Il a béni sa création et y a placé l’homme/la femme à son sommet. « Et Dieu vit que cela était très bon » (Gn 1, 31). Non pas lancée dans l’univers par pure fantaisie mais créée par amour, l’humanité est la plus grande gloire de Dieu. L’Histoire Sainte nous rappelle ces moments de communion et de tension, ces appels et ces rejets… Elle nous rappelle les dévoilements successifs pour aboutir au Dévoilement suprême en l’Incarnation du Fils. La préparation a été rude mais le résultat est éclatant : la communion possible dans le respect des différences et des autonomies. Le Christ, par toute sa vie, a réalisé ce ‘rêve divin’ au-delà même du péché et de la mort. L’Epiphanie est révélation de cette présence aimante et bienveillante.

Un Dieu qui aime : Si Dieu est Créateur et proche de son Peuple par dévoilement, il manifeste son amour et son désir d’une relation enracinée dans l’amour. Loin de la crainte et de la religion intéressée, notre foi s’oriente vers une relation de communion dans l’amour, amour envers Dieu et amour envers l’autre. Jésus nous a montré le chemin et nous en a donné la force. Par son Esprit Saint, il accomplit en nous la merveille de l’amour reçu et offert, à l’image de ce qui se passe en Dieu Lui-même. Comment demander d’aimer si Dieu n’est pas amour ? Comment inviter à la communion si ce n’est la communion qui définit le divin ? Nous arrivons ici au sommet de la révélation chrétienne : la communion trinitaire, éternelle en Dieu, est possible entre nous ! La Trinité est source et fin de toute chose. Elle est notre lieu de vie. L’Epiphanie est donc  révélation de l’obstination de Dieu à nous aimer et dévoilement de ce qui se passe en Lui.

  1. 2. Révélation sur l’homme/la femme.

Il est passionnant de se rapprocher de Dieu, non pas par simple construction intellectuelle ou par imagination, mais par l’approfondissement de la révélation. Dieu parle de Lui et se dit. Il l’a fait de façon définitive par son Fils Jésus. A nous maintenant de nous plonger dans le mystère et d’en tirer toute la substance. Cependant, parler de Dieu c’est parler de l’humanité. Si la création de l’homme et de la femme est le sommet de l’œuvre de Dieu à l’origine, leur salut et la grâce octroyée sont le sommet de la relation nouvelle et possible avec la Trinité Sainte. Salut car rachetés par le sang du Christ. Grâce car admis à la communion trinitaire par la filiation acquise à la Résurrection.

L’humanité est une : nous sommes tous unis par la création. Nous recevons la même terre et le même héritage. La dignité est inscrite en nous et nous devons la cultiver et la défendre. Tous sont admis à la Crèche et les Mages venus d’Orient nous le rappellent.

L’humanité est communion dans la différence : nous sommes tous différents de par notre création. Unique, chaque homme/femme porte en lui les signes de sa singularité. Tous sont admis à la Crèche : mages et bergers, riches et pauvres, simples et savants, jeunes et vieux, saints et pécheurs… La diversité des santons que nous plaçons avec plaisir dans nos crèches nous le rappelle.

L’humanité est appelée à la filiation adoptive : uns et portant différents, nous sommes tous appelés à la communion et à la vie dans l’amour. En acceptant Jésus le Christ comme Sauveur et la force de l’Esprit Saint en nous, nous pouvons appeler Dieu ‘Notre Père’ sans aucune crainte ou vergogne. Nous sommes effectivement les fils et filles du Dieu Très Haut qui s’est fait proche et même l’un de nous à Noël pour nous ‘combler’ de lui par sa Croix et sa Résurrection. C’est toute l’humanité qui est admis à la Crèche et qui peut appeler cet Enfant ‘frère’ parce que ‘Seigneur’ ! On est fils/fille en Lui.

  1. 3. Conclusion : quand l’étoile nous guide vers l’amour !

La fête de l’Epiphanie est cette joyeuse espérance que toute l’humanité sera sauvée. En accueillant toutes les races et tous les peuples aux pieds de l’Enfant, Dieu lui-même confirme sa volonté d’un salut universel. L’étoile nous guide vers Celui qui peut le réaliser et qui est ‘révélation’ de ce mystère. Prince de la paix mais aussi Sauveur du monde, l’enfant Jésus est le Christ attendu et le Seigneur parmi nous. ‘Un avec le Père’ (Jean 12),  il nous donne l’Esprit du Père et du Fils.

La fête de l’Epiphanie est cette certitude tranquille et sereine que toute l’humanité peut s’affirmer ‘enfants de Dieu’ dans la liberté et l’autonomie du choix. Non seulement créatures mais enfants de Dieu, de cette filiation adoptive obtenue par le Fils Unique. Après tous ces siècles d’errance et de recherche, nous voici arrivés à cette conviction et à cette réalité que c’est l’amour qui a présidé à tout et que c’est l’amour qui nous introduit dans le cœur de l’Amour. Suivons donc l’étoile !

P. Francis

 

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