CAREME 1 B

« L’Esprit poussa Jésus au désert »

(Marc 1, 12-15)

Le temps du carême vient de commencer. La cérémonie des cendres est un rite de pénitence et de conversion qui insiste à prendre au sérieux notre vie chrétienne. Ces quelques cendres sur notre front sont le signe de notre engagement à prendre la route de Pâques dans la persévérance et la joie. Pendant 40 jours, nous allons nous interroger, nous tourner vers Dieu, nous convertir à plus de vérité dans l’amour. Ces 40 jours sont un temps de grâce mis à notre disposition pour faire le point, nous amender et repartir, un temps pour redresser le courbé et pour aplanir les vallées béantes de notre âme, pour nous arrêter près de la source vive et nous en abreuver. Si dans notre culture, le carême est symbole de privation et de sacrifice, on peut le vivre dans la joie du retour au Père par la force de l’Esprit à la suite du Christ Seigneur. Notre ‘face de carême’ peut devenir resplendissant de la joie divine et de l’amour partagé. Cheminons donc avec Jésus pour le redécouvrir mais aussi suivons-le vers le Calvaire, passage obligé de toute vie, qui aboutira à la lumière pascale. Le temps est nécessaire mais ponctuel. La grâce pascale est offert mais éternelle.

  1. 1. Carême, temps de conversion.

On a souvent besoin d’une pause. Nos vies sont si agitées et si décousues. Il nous semble être emportés par la vitesse des événements et le rouleau-compresseur de l’urgence. On oublie parfois les petites choses qui font la vie et on passe à côté de bien des moments de joie. Nous en pâtissons comme aussi nos proches et les êtres aimés. Bien évidemment, on fera tout pour ceux qu’on aime, on se donnera à fond, on se sacrifiera même. C’est tout à fait louable et généreux. Il reste pourtant qu’on a besoin d’exprimer son amour dans la simplicité des mots et des gestes et qu’on a besoin de se faire dire qu’on est aimé. Notre vie spirituelle suit le même mouvement. Il ne suffit pas de se donner complétement pour se sentir ‘en règle’, ou de dépenser du temps pour être satisfait. Il nous faut donner du sens à nos engagements et de la profondeur. Comment le faire sinon en s’arrêtant et en exprimant clairement son amour et en se laissant aimer par Dieu dans la simplicité de la relation rétablie ? Le carême est ce ‘stop’ qui dit ‘je t’aime’, c’est ce moment de grâce où l’amour prend toute sa profondeur et donc toute sa grandeur.

Conversion des cœurs : on voit Jésus, dans l’Evangile, aller au cœur des choses. Il s’insurge contre les hypocrites et les ritualistes. Il descelle le manque de sincérité et l’habitude ou aussi le conformisme. Est-ce cela la vraie religion ? Une application de rites sans cœur et sans conviction ? Suffit-il de ‘faire’ ou de ‘pratiquer’ pour être proche de Dieu ? A la suite des prophètes, Jésus prône une religion du cœur qui prend sa source dans l’amour et s’épanouit dans la vie. Quand la flamme de la vie est allumée et qu’elle est alimentée par l’amour, alors s’embrasent nos vies si banales et si insignifiantes. S’unir au Père par le Fils dans l’Esprit donne raison à nos vies et sens à nos existences parfois monotones. Le carême reprend en mains les habitudes prises et insuffle de la vie et de la joie.

Conversion des mœurs : on voit Jésus, dans l’Evangile, toucher les cœurs et inviter à la conversion. Il ne suffit pas de montrer l’immoralité de certains actes ou l’amoralité de bien des existences, encore faut-il donner de la conscience et les raisons de nos choix vitaux pour enfin vivre dans la liberté des enfants de Dieu. Dire qu’une chose ou un acte est bon ou mauvais ne convainc pas si on n’invite pas au pourquoi et si on ne l’insère pas dans le tout de notre existence. Le carême tend à montrer du dedans les raisons de vivre et le sens des choses, enracinées dans l’amour et la volonté divine de faire de nous les enfants de la lumière.

Conversion à l’amour : on voit Jésus, dans l’Evangile, mettre la personne à la première place pour la resituer dans sa relation au Père. Nécessaires sont le pardon et la conversion, importants sont le repentir et la foi, fondamentaux sont l’amour et la grâce. Notre foi est illuminée par l’amour exprimé dans le sacrifice du Christ. Notre agir concret est illuminé par la grâce du Ressuscité. Notre éternité est donnée par la Sainte Trinité. L’amour, au début et à la fin, milieu de notre existence et lieu de notre éternité, au cœur de la Trinité.

  1. 2. Carême, temps pour la joie.

Bien que temps de pénitence, le carême est un temps de joie et de retrouvailles. La conversion exprime notre désir de vérité et d’authenticité. Elle vient relever ce qui a été souillé ou perverti, ce qui a été négligé ou dévoyé. La conversion est une étape, parfois difficile, parfois crucifiante mais une étape qui veut s’aligner sur notre vocation à l’amour et notre identité filiale. On retrouve le chemin qui mène au cœur du Père avec le Christ comme guide et avocat, avec l’Esprit comme force et énergie. Se convertir et croire à la Bonne Nouvelle ! La Bonne Nouvelle d’un Dieu qui aime et qui pour le dire a envoyé son Fils Unique, l’a laissé s’offrir en sacrifice d’expiation et l’a ressuscité pour lui donner gloire et puissance. Ce Fils, reconnu en Jésus de Nazareth, est le Bien-aimé du Père et donne l’Esprit à tous ceux qui accueillent la vie et l’amour dans la liberté. Cette grâce fait de nous des fils/filles du Père, participants de la vie divine.

La prière nous aide à reprendre pieds dans la relation. Elle est communion et non répétition. Elle est cœur-à-cœur et non soumission. Elle est animée par l’amour et non par l’obligation ou la peur.

Le jeûne nous aide à rétablir ce qui est déséquilibré et exagéré. Il est effort sur soi pour retrouver l’harmonie et la simplicité, l’humilité et la générosité. Il est animé par l’amour et non par la prescription ou le devoir

Le partage nous aide à ouvrir nos cœurs aux autres et à nous décentrer de nous-mêmes. Il est don de soi dans la relation retrouvée et saine aux autres et aux choses. Il est animé par l’amour et le désir du bien et non par une dîme obligatoire donnée à contre cœur.

C’est bien la joie qui anime nos efforts de carême car cette joie pressent la grande joie pascale, celle qui ne s’éteint pas, celle qui plonge dans les relations trinitaires.

  1. 3. Conclusion : se repentir et croire.

Jésus se rend au désert. Lieu de tentation mais aussi de rencontre, le désert est notre chance. Le carême nous invite à ‘faire désert’ pour faire la vérité en nous. Comme Jésus, espérons rétablir l’harmonie de la création ou au moins l’harmonie de nos vies déboussolées.

Jésus appelle à la conversion. Empêtrés dans nos habitudes et parfois de mauvaises habitudes, il est temps de nous libérer et de briser les chaînes de nos esclavages.

Jésus demande de croire en la Bonne Nouvelle. Croire que l’amour est le tout de notre vie et ainsi entrer dans le Royaume de la Trinité Sainte, Dieu d’amour.

P. Francis

 

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