ORDINAIRE 18 B

« Le Fils de l’homme, lui que Dieu le Père a marqué de son empreinte »

(Jean 6, 24-35)

Jésus a accompli son grand miracle : la multiplication des pains. Grâce aux « 2 poissons et aux 5 pains » d’un petit garçon, le signe a pu s’accomplir et la foule a été rassasiée. C’est certes un grand événement mais Jésus, par ce signe, nous entraîne vers le haut et nous suggère des vérités spirituelles au-delà du signe matériel. On est toutefois étonné devant le miracle mais la matérialité du geste ne doit pas nous voiler la spiritualité du signe. Si Jésus est abondant dans son œuvre, c’est que le Père est généreux. SI Jésus a compassion de la foule, c’est que le Père est miséricordieux. Si Jésus se montre le Fils, c’est que Dieu est Père et donne l’Esprit Saint en abondance dans son immense amour pour nous. La suite du texte nous suggère ce passage, cette traversée vers la vérité, du visible à l’invisible, des yeux du corps aux yeux du cœur, d’un ventre affamé à une âme assoiffée de vie et de beauté. Il y a toujours un passage à opérer et ce passage, comme celui de Pâques, nous met en présence d’une réalité éternelle et constante, celle d’un Dieu qui aime et qui nous appelle à lui pour partager sa vie et ses relations. La communion est le but ultime et définitif de tout miracle, de tout signe et de tout geste du Christ. C’est vers elle que nous tendons, c’est en elle que nous vivons et c’est par elle que nous existons. Ouvrons  nos cœurs à la communion trinitaire !

  1. 1. De pain terrestre au pain céleste

Nous sommes bien souvent trop occupés du terrestre pour nous inquiéter du céleste. La vie actuelle ne nous laisse aucune trêve et aucun moment de répit. D’une activité à l’autre, d’un temps de travail à un temps de vacances, d’une période de la vie à une autre, il semble qu’on manque de temps pour notre âme ou toutefois pour la méditation et le recueillement. Le risque est grand de se concentrer sur le matériel et d’oublier l’aspect spirituel de la vie ou de se contenter du ‘physique’ en négligeant l’esprit. Pourrions-nous dire que notre époque souffre plus d’indifférence que d’athéisme théorique, de relativisme que de certitude, du toucher que du voir ? Le passage nous est difficile car la société est organisée de telle façon qu’on manque de temps, d’espace, de vérité et d’objectif spirituel. Jésus, quant à lui, nous rappelle que le passage est nécessaire, non seulement pour ‘trouver’ l’invisible en nous ou une Présence aimante mais aussi pour apprécier le visible et en user comme tremplin vers le Ciel. Voilà donc non une dichotomie mais une harmonie qui nous soulage !

La Création comme expression d’un amour : la Création est ce grand tableau peint par le Père pour nous dire son amour. Quelle merveille de contempler l’univers visible ! L’infiniment grand nous donne le vertige. L’infiniment petit attise la curiosité. L’extension de l’univers nous interroge sur le début de son mouvement. Les distances nous déstabilisent. On peut se dire que, face à cette grandeur, nous sommes dus au ‘hasard’ (bien efficace, il est vrai !) ou qu’au contraire, nous avons été désirés et créés et que la Providence a veillé à notre apparition, communautaire et personnelle. A nous de méditer cette merveille et de trouver dans les lois physiques, astrophysiques et quantiques les appels amoureux du Père. La Création est un tremplin vers l’amour !

Les signes de l’esprit dans la matière : nous ne pouvons tout maîtriser et bien des choses nous échappent. Les scientifiques eux-mêmes restent modestes dans la découverte des lois naturelles qui les introduisent à d’autres hypothèses et d’autres recherches. Y aurait-il un dessein ? Une intelligence aurait-elle présidé à cette mise en place efficace et  harmonieuse ?  Nous n’arrivons pas à considérer le visible sous son seul aspect matériel, nous sentons une ‘animation’, un  ‘esprit’, une organisation. Si cet aspect est négligé, nos contemporains se tournent vers la superstition, l’astrologie, les ‘expériences du surnaturel’ diverses. Si on tient compte de cet aspect, on découvre dans l’harmonie une pensée, un appel à être meilleurs, une vie continue, un esprit d’harmonie et d’amour. La matière est un tremplin vers l’amour !

Quand notre vie est une marche vers le Ciel : il semble qu’aujourd’hui la dépression et les maladies nerveuses soient les conséquences d’une vie sans but et qui manque de sens. Lancés dans l’univers et objet de consommation, l’humain est un producteur-consommateur qui, après avoir souffert et peut-être avoir vécu quelques moments de bonheur, disparaît dans le néant. L’humanité pourtant est voulue et aimée. Notre vie est un chemin et non une voie de garage. Notre corps est appelé à la résurrection et non à la destruction. Notre sagesse est une poussée vers le Ciel et non une excitation vouée  au nul. La vie est un tremplin vers l’amour !

Jésus a su nous dire l’essentiel mais surtout a su nous redonner confiance en harmonisant nos vies dans tous ses aspects : créature aimée jusqu’à obtenir la filiation adoptive pour entrer dans les relations trinitaires éternelles, dans l’amour. Le matériel est le passage obligé vers le Ciel.

  1. 2. De l’humain au divin.

Nous avons bien du mal à nous accepter comme êtres aimés et appelés. Ne serait-il pas plus simple de sombrer dans le non-sens ou dans le pessimisme pratique et philosophique ? Le Christ nous sort de cette pensée et de cette pratique. Il utilise le miracle, le signe, le geste et la parole pour nous entraîner vers le sens, l’harmonie et la vérité. Usons donc de tout ce qui nous entoure et de toutes nos ressources intérieures pour élever notre âme, notre esprit et notre corps à la joie de la Trinité Sainte et à l’amour des Personnes Divines !

Toute la création appelée au salut : nous ne pensons pas que la nature est divine ou que nous sommes des dieux ou des parcelles divines disséminées dans l’univers et cherchant à se ré-unir pour re-former la divinité ! L’univers est autonome par ses lois mais créé. Par le force de l’Esprit de Résurrection, la création est appelée elle-aussi au renouveau jusqu’à atteindre sa stature définitive en touchant le cœur de Dieu. Ainsi, la création (la matière, le physique, l’humain…) est notre passage obligé pour trouver les signes divins et pour nous élever vers la Trinité. Tant que nous ne sommes pas des anges, notre humanité est la voie vers Dieu.

L’humanité transformée par la filiation : nous ne nous pensons pas dignes du Ciel ou sommes trop orgueilleux pour accepter, à travers nos faiblesses et limites, l’appel du Père. Et pourtant, par notre humanité blessée et limitée, nous marchons vers le Père par le Fils ressuscité et dans l’Esprit. L’Incarnation a béni notre humanité et la Résurrection l’a sanctifiée et transformée pour la rendre apte au divin. Nous passons d’un statut de créature à celui, voulu par Dieu, de fils/fille. Notre humanité est le lieu de cette découverte, acceptation et transformation.

  1. 3. Conclusion : l’homme nouveau vivant d’amour !

Jésus fait de la matière un chemin vers le spirituel. Pour être fils, on doit d’abord accepter d’être homme ou femme. Notre humanité est la condition de notre élévation et communion avec la Trinité. On ne devient soi-même que quand on a accepté d’être aimé et qu’on s’engage dans l’amour.

P. Francis

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