ORDINAIRE 7 A

ORDINAIRE 7 A

« Soyez parfaits… »

(Mat 5, 38-48)

Le discours de Jésus sur la montagne est la charte du Nouveau Testament. Jésus annonce la couleur du Royaume, ses exigences, sa profondeur, sa dignité. Il parfait la volonté du Père et donne l’Esprit pour accomplir cette volonté. Non pas seulement commandements mais exigences demandant conscience et amour, la Loi nouvelle vient du Cœur de Dieu et y prend toute son énergie, sa vitalité et son dynamisme. De fait, Jésus le Fils est la Loi nouvelle et en lui, nous avons accès à la volonté divine mais aussi à la communion trinitaire. N’est-ce pas le rôle de la loi de nous orienter vers le bien ? Ici le Bien c’est Dieu. Le rôle de la loi n’est-elle pas de nous consolider en tant que personne humaine ? Ici la personne humaine se révèle filiale. La loi divine ne devrait-elle pas être expression d’amour ? Ici, Dieu se définit comme amour, comme communion et communication. Il nous reste à entrer dans cette logique qui met en mouvement la conscience, la liberté, l’esprit et le cœur. Alors que la sainteté était demandée, aujourd’hui c’est la perfection qui est requise. Accéder à la perfection en œuvrant par le cœur du Père, grâce au Fils dans l’Esprit Saint. Un défi qui nous mène vers le haut, qui dépasse nos forces mais qui prend force en l’amour du Père.

  1. La Loi du Royaume.

Dieu a-t-il besoin de donner des commandements ? Pourquoi des commandements ? Ils sont comme un phare dans la nuit, un guide vers la lumière, une espérance dans notre cheminement. On peut s’enfermer dans le légalisme et vider ainsi les commandements de leur substance, de leur vitalité et de leur objectif. On peut aussi les prendre comme une grâce, une orientation non seulement vers le ‘bien-faire’ mais vers le ‘bien-être’, vers la croissance de la personne, vers la vérité. Ils nous plongent dans le monde nouveau quand ils sont vécus dans l’amour. Et sans amour, rien ne subsiste et rien ne croît.

‘Bien-faire’ : on trouve souvent que le christianisme est exigeant. Il demande trop : trop de conscience, de réflexion, de nuances, de liberté. Il en appelle à la raison et au cœur. Il harmonise la foi et la raison, le haut et le bas, le divin et l’humain. Il demande d’agir non pas comme des automates mais comme des personnes humaines douées de liberté et de responsabilité. Obéir n’est pas un aveuglement mais une responsabilité et une acceptation des origines et fins demandées. Obéir n’élimine pas la réflexion, le questionnement, la profondeur de la pensée. Obéir, c’est faire confiance, c’est cheminer un peu dans la nuit et beaucoup dans la lumière. Le Christ nous veut libre dans l’Esprit pour ‘voir’ le Père. Il exige notre liberté dans l’amour. Il demande notre amour dans la liberté. Les lois se fondent dans le Loi divine. Elles expriment l’Unique. Elles plongent dans la filiation. Elles sont la Loi mais le Fils est notre Loi. Notre agir reflète ce que nous sommes et participe à notre élévation vers le Bien. Peut-on agir contrairement à son être ? N’y-a-t-il pas ici le risque d’un éclatement, d’une dichotomie malsaine qui désoriente la personne et la divise ? Le faire participe de l’harmonie et de la sérénité. Il devient signifiant et significatif. Associé au Bien, il est perfection.

‘Bien-être’ : on pense souvent que les chrétiens sont des croyants, des dévots, des bons religieux. Quelque fois, on les prend pour des moutons, des suiveurs, des atrophiés. On les moque quand ils défendent la loi naturelle ou le bon sens. On les persécute quand ils cherchent la vérité et la justice. On va jusqu’à les tuer quand ils parlent d’amour et de bonté. Le chrétien, lui, se considère comme un fils, une fille, du Père par la victoire du Fils dans l’Esprit de force. C’est sa dignité et son identité. C’est là sa force véritable et sa richesse. La filiation l’anime  et vient donner sens à l’humain. Cette identité en Christ n’est pas idéologie et opinion, option ou illusion. Cette identité est réelle dans la Résurrection du Fils. Elle a été révélée en Jésus le Christ, incarné, mort et ressuscité. Elle est à la base de notre anthropologie et de notre vision des choses, de notre éthique et de nos options morales, de notre philosophie et de notre théologie. Le Bien-être est là : agir selon ce que l’on est. Être ce que l’on est. Trouver la force dans ce que l’on est. La loi divine nous oriente vers cette identité avec tout ce qu’elle a d’exigence et de dynamisme, de créativité et de beauté. On comprend mieux la perfection demandée.

La perfection du Royaume n’est pas un idéal moral seulement, elle est un état de fait, un état d’être. Être ce que l’on est et ainsi agir en conséquence. Harmoniser l’être et l’agir pour œuvrer en perfection. Le Christ ne demande pas d’être des surhommes mais des hommes,  des femmes, tout simplement !

  1. 2. L’amour pour le Royaume.

Comment agir ? Comme être ? Dans l’amour, dit Jésus. C’est l’amour qui devient règle car il est à l’origine de la Création et le motif de la recréation en Christ. C’est l’amour qui explique l’Incarnation du Fils et qui fait comprendre la Résurrection du Crucifié. C’est l’amour qui révèle la Trinité de Dieu sans entacher son unité. C’est l’amour qui est notre demeure car Dieu est Demeure.

Agir par amour : agit-on par devoir, par intérêt, par nécessité ? Cela peut arriver. On agit pourtant dans l’amour, par amour, avec la force de l’amour. Il permet de dépasser nos limites et d’en trouver d’autres, de grandir en humanité et en solidarité. L’action suit l’être qui aime comme son Créateur aime. Si tout est grâce, tout est chemin vers le Mystère, l’amour trinitaire. Non pas comme un  but idéal à poursuivre mais comme une réalité qui se laisse toucher maintenant.

Etre dans amour : être soi-même, être aux autres, être tout simplement. Nous recherchons la vérité de notre être et le sens de notre vie. Si donc la perfection se trouve dans l’amour, c’est dans l’amour que l’on croît et que l’on devient soi-même. L’harmonie de l’être est possible en Dieu car Dieu est Harmonie et Beauté. C’est notre chemin vers la grâce et notre voie dans l’amour. On comprend dès lors qu’il n’y a rien qui s’oppose à l’équilibre si l’on vit selon la loi divine, naturelle et révélée, si l’on cherche le Royaume, si l’on agit en fonction de son être. Seuls le mal et le péché détruisent cette harmonie et déséquilibrent le corps, l’esprit et l’âme.

  1. 3. Conclusion : perfection dans l’amour.

Le Christ demande perfection dans nos relations à Dieu et aux autres pour dépasser l’agir des pharisiens et des publicains. En Dieu, on trouve cette force.

Le Christ ne limite pas la perfection à la seule morale, il l’enracine dans l’ontologie. C’est l’être qui demande la perfection pour pouvoir agir en conséquence. C’est être se doit d’être filial dans son extériorité et filial dans son intériorité. Le fils/la fille agit selon les inclinations de son être filial.

Le Christ enracine dans l’amour l’être et l’agir. On se doit de refléter l’amour puisque Dieu est amour. Origine et fin de tout, la Trinité est notre quotidien.

Père Francis

 

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