ORDINAIRE 24 B

« Si quelqu’un veut marcher à ma suite… »

(Marc 8, 27-35)

Voici Jésus à nouveau en terre païenne, revenant sans doute vers la Palestine. Césarée-de-Philippe est un lieu important pour la survie des populations locales. C’est là, en effet, que se trouve la source du Jourdain et que l’eau jaillit du rocher bruyamment et comme par miracle (c’est le Golan actuel). On est impressionné par tant de puissance et on remercie le Ciel pour la fécondité que l’eau va produire dans la vallée jusqu’à la Mer morte. Se situent à cet endroit des cultes païens, romains et orientaux, pour maîtriser cette eau. Ici se placent plusieurs scènes évangéliques comme la profession de foi de Pierre ou son ‘institution’ comme Roc sur lequel l’Église sera bâtie. L’Évangile de Marc est plus sobre. Pierre y professe la messianité de Jésus et celui-ci annonce sa Passion. Les Apôtres ne sont pas encore prêts à cet événement dramatique mais central par lequel le Christ va sauver l’humanité pécheresse. Ils ne comprennent pas Jésus décidé à monter à Jérusalem pour accomplir cette mission de rédemption. S’ils veulent suivre le Maître, ils devront prendre leur croix.

  1. 1. L’identité du Christ.

Comment connaître Jésus ? Qui est-il ? Voici une énigme de l’histoire qui passionne les foules. On reconnaît son existence historique mais plus que cela… Il est difficile de cerner sa personnalité et même son œuvre. Fondateur de religion ou doux rêveur manipulé par des disciples avides de puissance ? Mort en croix ? Certainement.  Ressuscité ? Seule la foi peut l’affirmer. Il est pourtant vrai que des disciples apeurés et dispersés après la mort du Maître se retrouvent et proclament cette nouvelle incroyable de la Résurrection et du salut pour tous. Partis aux quatre coins du monde, ils donneront leur vie et mourront pour cette cause. Étonnante aventure qui nous touche de près. Incroyable mission qui nous incombe aujourd’hui. L’identité de Jésus de Nazareth en est la cause. Et cela change tout.

Jésus le Messie : Oui, il est le messie attendu et désiré. Un messie bien différent de ce que les croyants espéraient. Un messie non politique mais révolutionnaire par sa spiritualité. Un messie fidèle à la Loi et à l’Alliance mais scellant en son sang une Loi nouvelle et une Alliance éternelle. Un messie selon la volonté de Dieu et non les fantasmes des hommes. Un messie doux et humble de cœur, souffrant, et non triomphant et glorieux. Un messie en croix et non sur le trône de César. La messianité de Jésus et son œuvre ont permis une relecture des textes bibliques et une reconsidération des termes de l’Alliance. Dieu est si différent de ce que nous en percevons ! Le messie vient rétablir l’équilibre. Notre vision de Dieu change.

Jésus le Fils de Dieu : Oui, le messie est le Fils de Dieu. Cette affirmation révolutionne l’histoire, la pensée et la société. Dieu a-t-il un Fils, lui l’Éternel, l’Esprit, le Tout-Puissant ? De quelle façon Jésus est-il le Fils de Dieu ? Question controversée et pourtant essentielle au christianisme. Si Jésus n’est  qu’un prophète parmi d’autre, aussi saint soit-il, ou un messie sans envergure divine, notre salut n’est plus assurée et notre foi en la Résurrection en est altérée. C’est parce qu’il est ressuscité que Jésus est reconnu Fils de Dieu, « de même nature que le Père, Créateur et  Sauveur, Dieu fait homme… ». La Résurrection a révélé son identité divine et a changé notre perception de Dieu l’Unique car le Christ  « vient du Père avec qui il ne fait qu’un ». S’il est Fils de Dieu, Dieu est Père et l’Esprit Saint est donné en abondance, Dieu nous sauve et fait de nous ses fils/filles, Dieu nous accueille en sa maison pour partager sa divinité en communion. Si Jésus est Fils de Dieu, alors sa mission touche notre être et bouleverse notre personne pour l’unir à Dieu. Il nous rend aptes au divin.

Jésus Dieu-avec-nous : Oui, le messie Fils de Dieu est Dieu. Cette affirmation de foi a des conséquences importantes pour nous, conséquences philosophiques, théologiques, spirituelles, morales et même sociales et politiques. Nous ne pouvons plus être comme avant, ignorants et en  attente. Nous recevons une connaissance qui perce les secrets de Dieu et rend intelligent l’univers, qui donne du sens à nos vies et informe nos relations humaines. Nous pouvons aimer comme ce Dieu d’amour qui se révèle par le Christ et qui appelle à plus d’être, plus de vérité, plus de profondeur. Le Dieu Un est aussi le Dieu Trine. L’unité et la Trinité de Dieu nous emportent dans des relations nouvelles et authentiques, des relations de communion et de partage, qui accueillent les différences et qui intègrent l’unicité. Voyons aussi les conséquences sur notre approche sociale et politique quand c’est la solidarité et le bien commun qui doivent triompher sur nos égoïsmes et nos intérêts.

Si Jésus est le messie, Fils de Dieu, s’il est Dieu, notre vie se transforme à son contact et se transfigure dans l’Esprit pour adorer le Père et vivre de la communion trinitaire. Tout change en nous. Tout change pour nous. Désormais, l’amour est au cœur de la vie.

  1. 2. A la suite du Christ.

Cette foi lumineuse ne se perd pas dans l’illusion ou l’utopie. Nous restons bien ancrés sur terre dans un réalisme véridique et une spiritualité entreprenante. Jésus ne promet pas une vie facile car le péché existe toujours et le mal rôde dans le monde. Sa crucifixion est bien la preuve que, tout Fils qu’il était, il a dû subir les effets du mal et du péché. Il a réussi pourtant cet exploit de transformer la croix, objet absolu de souffrance et de cruauté, en un instrument de gloire et de salut. La croix douloureuse devient la croix glorieuse. Le Vendredi Saint s’éclaire par le matin de Pâques.

Prendre sa croix : la vie ne nous gâte pas. Il y a bien des raisons, des choses maîtrisables et d’autres non. La souffrance, le mal, les conséquences du péché, nos erreurs… nous enveniment l’existence. Même innocents, nous partageons la misère humaine et les affres du péché des autres. Prendre sa croix, c’est marcher vers le Calvaire, sachant que la lumière nous attend au bout du chemin.

Suivre Jésus : Où donc nous mène Jésus ? Vers son Royaume de lumière, oui. Vers le Père, certainement. Cette suite du Christ est une entrée, lente parfois mais incontestable, dans le Cœur du Père qui nous accueille par son Fils dans l’Esprit Saint. Si la souffrance nous terrorise et nous affecte, unir ses souffrances au Christ en croix est notre humble recours. Le Fils saura les transformer en œuvres de gloire et de victoire.

  1. 3. Conclusion : une vie de communion.

Croire que Jésus est le Messie, c’est accueillir la grande attente biblique.

Croire que Jésus est le Fils de Dieu, c’est transformer sa vie en capteur de lumière.

Croire que le Christ est Dieu, c’est entrer dans la communion trinitaire.

P. Francis

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