ORDINAIRE 20 A

« Prends pitié de moi, Seigneur, fils de David »

(Mat 15, 21-28)

Notre vie quotidienne est faite de rencontres et de questionnements. Nous sommes interpellés par des non chrétiens ou des non croyants. Nous sommes tentés quelque fois de nous renfermer dans notre Eglise ou notre communauté, là où le langage est commun et où la foi est vive. Il est certes plus facile de ‘rester entre nous’ et de développer notre connaissance et notre pitié. Les Apôtres ont connu cette même tentation et les exemples sont légions dans l’Evangile. Les Actes des Apôtres, eux-mêmes, rapportent ce problème jusqu’à la décision de sortir du cadre d’Israël et de s’adresser aux païens et étrangers, appelés eux-aussi au salut et à la communion trinitaire. L’Eglise n’est elle-même que quand elle évangélise, qu’elle proclame la Bonne Nouvelle, qu’elle partage son enthousiasme, qu’elle accueille tout homme, toute femme, assoiffé d’eau vive et d’absolu. Mais l’Eglise, c’est nous et là où nous sommes, nous sommes témoins et responsables. Encore faut-il en avoir conscience et avoir le courage de ‘dire notre foi’ dans l’amour.

  1. 1. Entendre le cri des hommes

Notre monde est plein de chercheurs de Dieu et de cœurs en attente. Il est plein de forces vives qui ne demandent qu’à rencontrer le Dieu véritable, par le Fils Bien-aimé qui exprime son amour, dans l’Esprit de sainteté. On peut désespérer de ce monde en ébullition ou en contradiction manifeste avec les valeurs évangéliques, on peut se scandaliser de la baisse de la pratique religieuse dans bien des régions du monde, on peut se cloisonner face à la critique ou la persécution anti chrétienne de plus en plus vive aujourd’hui. Mais on peut aussi lever la tête et, par nos vies comme par nos paroles, proposer la vie au lieu de la mort, la paix au lieu de la violence, la justice au lieu de l’exploitation abusive des hommes, l’amour comme raison de vivre émanant du Dieu d’Amour qui a donné son Fils pour nous le dire et qui donne encore son Esprit pour en vivre. Notre époque n’est pas pire ou meilleur que l’époque des Apôtres ou de l’Eglise primitive. L’Evangile résonne de la même façon avec peut-être des mots nouveaux et des méthodes modernes.

Désir du sens : on est étonné de tant d’arbitraire et de relativisme. Notre monde ne propose rien qui vaille la peine de donner sa vie ou qui donne des raisons de vivre. Les jeunes vivent dans ‘ l’à peu près’ ou dans ‘le dernier gadget’. Rien d’étonnant qu’ils risquent stupidement leur vie et leur santé dans des expériences ‘extrêmes’ ou qu’ils se donnent à des groupes mortifères. Sommes-nous capables, comme Jésus, de donner du sens, d’expliquer les valeurs naturelles et spirituelles, de susciter la flamme en proposant la vie ? Le Christ est la Vie et la Lumière. Il éclaire les cœurs.

Désir de justice : on est étonné de tant d’injustices et d’aliénations. Notre monde est basé sur l’argent et le profit et l’homme a peu de place, sinon la place de produire et de consommer à l’excès. Nous vivons dans la mode du moment et nous nous laissons séduire par l’avoir et le paraître. Rien d’étonnant qu’on déprime et que les salles d’attente des médecins ne désemplissent pas, que le suicide est un mal moderne, que la révolte gronde dans le monde. Sommes-nous prêts, comme les prophètes bibliques (Isaïe 56, 1 ss) et comme Jésus, à défendre le droit et la justice, à mettre l’homme à la première place, à l’accompagner sur son chemin de vie difficile mais nécessaire, à prendre le temps de l’écouter et de répondre à ses besoins et à ses attentes ? Le Christ est la Porte et la Vérité. Il éclaire nos esprits tourmentés et apaise nos cœurs inquiets.

Désir d’aimer : on est étonné de tant de solitudes et de pleurs. Notre monde donne l’illusion d’être aimé ou l’illusion de la réussite. Il n’aime que celui qui se range ou celui qui s’alène, celui qui suit en mouton ou qui pose peu de questions. Alors que nos chansons sont pleines de mots d’amour et que nos films regorgent d’histoires romantiques, on sent le poids de l’isolement et l’amertume du quotidien. Sommes-nous prêts à dire l’amour véritable, l’amour qui se donne et se reçoit dans la gratuité, l’amour qui va jusqu’au sang pour le bien et le droit, l’amour qui est communion dans la liberté et l’épanouissement de soi ? L’amour qui est communion du Père, du Fils et de l’Esprit Saint ? L’amour qui nous appelle à la vie éternelle ? Le Christ est la Résurrection et le Fils Unique. Il invite à la joie trinitaire dans une relation filiale qui fait de nous des hommes et des femmes authentiques.

Alors qu’on parle déjà de ‘post-christianisme’ et de ‘postmodernité’, l’humanité reste la même avec les mêmes aspirations à la vie, à la justice et à l’amour. Le Christ est la réponse silencieuse du Père. C’est à nous à proposer cette réponse  au monde en attente.

  1. 2. Oser évangéliser.

Il y a urgence à évangéliser ou à ré-évangéliser. Il y a urgence à contredire les mensonges proférés sur les chrétiens et à désavouer les insanités dont on nous affuble. Il y a urgence à défendre la vérité de la foi chrétienne et à proposer le Christ, Chemin de vie.

Sortir de nos cadres : nous avons une histoire séculaire qui peut nous donner des orientations mais il nous faut dire avec les mots d’aujourd’hui les réalités éternelles. L’Evangile, c’est le Christ. Il est Bonne Nouvelle pour l’homme. Homme et Dieu, il est l’unique médiateur entre l’humanité et la divinité. Fils de Dieu, il porte au Père et donne l’Esprit pour vivre aujourd’hui la relation filiale. Cette Bonne Nouvelle demande à être proclamée toujours et partout car elle est vérité qui fait vivre et harmonie qui crée la paix et la justice. Nous sommes capables d’imagination et de créativité pour proposer dans le monde contemporain la Voie du Ciel qui prend racine sur Terre.

Oser l’adaptation : nous avons des traditions et des principes de catéchèse et de proclamation mais il nous faut nous adapter à la mentalité moderne et au langage des hommes d’aujourd’hui. Le cri des hommes est le même, les moyens de crier changent, les méthodes s’adaptent, les cœurs écoutent… On gagne à se mettre à niveau et à s’engager dans le dialogue et la réflexion philosophique, éthique et spirituelle contemporaine. N’ayons pas peur de dire qui nous sommes, pourquoi nous croyons et comment nous en vivons. Encore faut-il être cohérents et crédibles. L’Esprit Saint nous y aide.

  1. 3. Conclusion : partager notre amour

La Cananéenne de l’Evangile du jour crie vers Jésus. Bien qu’étrangère à la foi d’Israël, elle comprend la puissance et la force du « fils de David ». Elle s’ouvre à la vérité. Elle est capable de comprendre et de voir en Jésus une réponse à sa douleur de mère. Notre monde est capable d’Evangile !

Jésus ne répond pas immédiatement et la met à l’épreuve. Même les disciples s’en étonnent. Les cris sont terrifiants, à la façon orientale. Au-delà des cris, c’est la foi qui s’exprime, c’est le cœur qui se lâche, c’est la vie qui remonte. Jésus répond alors quand il y a dialogue et que la relation sincère s’installe. Notre monde est capable de relations authentiques. Osons partager notre amour !

P. Francis

 

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