ORDINAIRE 30 B

« Il t’appelle »

(Marc 10, 46-52)

Jésus, en s’avançant sur les routes et chemins de Galilée, ne pouvait éviter les pauvres et les petits. Mais le désirait-il seulement ? Il se met à la recherche de la brebis perdue et du petit reste d’Israël, celui qui reste attentif à la Parole de Dieu et qui sait reconnaître les signes divins parmi lui. On pouvait penser que les prêtres du Temple ou les scribes furent préparés à la connaissance sensitive ou scripturaire du Messie, il n’en est rien. Ils passent à côté des signes et des appels alors que les simples et même les ‘rejetés’ de la Loi se montrent perspicaces et du fait, enthousiastes à la vue de Jésus. Ils reconnaissent l’Envoyé de Dieu, le Fils de David, le Seigneur. C’est l’occasion pour nous de nous demander si nous voyons les signes du Seigneur dans nos vies et dans le monde, si nous percevons l’Esprit à l’œuvre chez les hommes, si nous accompagnons les jeunes pousses vers la pleine maturité. Par son Incarnation, le Fils a pris notre chair et toute notre humanité. Par sa Résurrection, il pénètre et transforme notre réalité. Sa présence se fait palpable à celui qui a les yeux ouverts sur l’invisible et à celui qui aime. Le Fils illumine par son Esprit et donne sens à nos existences. Il nous unit au Père pour vivre en enfants de lumière, dans l’Esprit de vérité.

  1. 1. Le Seigneur qui illumine.

Il nous arrive de fermer volontairement les yeux. Souvent, nous sommes aveuglés par l’orgueil ou l’égoïsme. Parfois, le péché nous entraîne vers des sentiers chaotiques. Malheureusement, nous nous obstinons dans l’aveuglement et préférons les ténèbres à la lumière ou à la promesse de lumière. Est-ce donc une réaction typiquement humaine  ou est-ce notre paresse qui prend le dessus ? Le Seigneur, quant à lui, propose sa lumière, ouvre nos yeux, illumine nos esprits et nos corps pour donner consistance à nos âmes en recherche. La lumière vient du dedans et enveloppe le dehors. Elle est un don de l’Esprit qui mène au Père.

Lumière du baptême : par vocation, nous sommes appelés à ‘l’illumination’, le baptême nous y porte. On oublie que le baptême/confirmation est une illumination de la personne qui rejoint alors la présence divine par la grâce obtenue. Les rites du baptême veulent signifier cette nouveauté, ce changement de solidarité et de monde. Nous pénétrons plus avant dans le mystère en touchant au Mystère de la vie et de l’amour. Raviver son baptême, c’est prendre conscience de sa vie nouvelle et de son engagement dans l’amour, sa participation à la communion trinitaire.

Lumière de la Parole : par vocation, nous sommes appelés à la vérité et à la connaissance, la Parole nous y porte. Elle est tranchante et perçante, pénétrante et transformante. La Parole n’est pas un discours extérieur qui viendrait violenter notre conscience, elle est le Logos Eternel, Parole Créatrice, Grâce et Sagesse. La recevoir, c’est goûter à la paix et aux joies divines, c’est ouvrir son être à la Vérité et à la Vie, c’est toucher le Cœur de Dieu. La Parole, c’est le Verbe qui se donne, c’est le Fils parmi nous.

Lumière dans l’Esprit : par vocation, nous sommes appelés à une vie équilibrée et conséquente, l’Esprit nous y porte. Comment cloisonner des parties entières de notre existence sans se laisse toucher ou transformer ? L’Esprit accomplit le miracle de l’unité et de la sérénité. Il est celui qui pousse à l’harmonie et qui susurre les paroles d’amour du Père, par la voix du Fils.  L’harmonie vie/éthique, spirituel/matériel, visible/invisible… ne se réalise pleinement qu’en Lui, unité du Père et du Fils. Ainsi, s’ouvrir à l’Esprit, c’est s’ouvrir à la lumière qui donne connaissance véritable des mystères de Dieu et du mystère de l’humanité. Il nous obtient de comprendre notre appel à la filiation divine et nous met sur la voie pour en vivre vraiment.

On le voit, et l’épisode bible de ce dimanche nous le rappelle, la lumière est à notre portée. N’est pas toujours aveugle celui que l’on croit ! Est aveugle celui qui se ferme à la grâce ou celui qui se veut sa propre origine. Est aveugle celui qui s’embourbe dans le péché. La lumière pourtant est accessible, encore faut-il humblement la demander : « Rabbouni, que je voie ! » suppliait Bartimée (Mc 10, 51).

  1. 2. Le Seigneur qui intercède.

Recevoir la lumière, oui ! Pour vivre de la vie nouvelle et communier à la joie trinitaire ! Y-a-t-il une autre raison ? Quelle raison nous pousserait à demander la lumière et la sagesse sinon celle de se fondre sans se confondre dans l’amour trinitaire ? Pour cela, il nous faut celui qui permet la relation, qui accomplit la communion, qui est le lien entre Dieu et l’humanité : le Christ, vrai Dieu et vrai Homme. Et Dieu l’a fait ‘Grand Prêtre’, intercesseur, unique intermédiaire (Hébreux 5). Seul prêtre de la Nouvelle Alliance, il nous relie (re-ligare = religion), il nous connecte, il nous unit au Père par l’Esprit. La lumière qui a illuminé notre vie devient Lumière éternelle en la Trinité.

Intercession : Jésus le Christ parle pour nous. Il est mort pour nous et donc a accompli la volonté divine. Il a pris nos péchés et par son sacrifice, nous a obtenu le pardon. Par sa Résurrection, il nous a obtenu la grâce d’être fils/filles en lui. « Avocat » dirait la Tradition, il parle en notre nom et nous représente. Unis à lui par le baptême, Corps du Christ, nous accédons au Trône divin avec lui. Le Verbe éternel, Parole faite chair, est cette Sagesse divine créatrice qui nous a créés, nous a recréés et sanctifiés, nous entraîne dans le Dialogue d’amour trinitaire.

Communion : Jésus le Christ nous plonge en Dieu. Son Œuvre est de faire de nous des fils/filles et de jouir éternellement de la Présence divine dans un dialogue sans fin. La communion est union sans confusion. Elle est éternelle comme la Trinité et s’épanouit dans la différence respectée. Nous ne nous dissolvons pas en la Présence divine, nous l’accueillons selon la Volonté du Père par le Fils dans l’Esprit Saint. Cette lumière demandée et obtenue nous a préparés à la rencontre de la Lumière véritable pour une Rencontre éternelle. Tout cela par amour et rien de cela, sans amour !

  1. 3. Conclusion : « Que je voie ! »

Comme Bartimée, nous sommes aveugles sur le chemin qui croise le Seigneur. Reconnaître le Messie, c’est rencontrer soudainement le fils de David qui, de fait, est le Fils de Dieu. Le savoir ne suffit pas, encore faut-il lui demander la lumière, le supplier de nous guérir, s’ouvrir à l’imprévisible. Insister  est déjà prier. Bartimée dérange son entourage mais n’en a cure. Il veut ‘voir’ Jésus de ses yeux blessés car les yeux de son cœur l’ont reconnu. En fut-il ainsi pour nous !

Comme Bartimée, nous voulons soigner le corps, alors que nous devrions être prêts à l’éclosion du divin dans nos vies. Nous laissons le divin à d’autres ou aux spécialistes alors que la Présence Divine est pour tous, que le salut s’offre à tous, que l’amour n’a pas de limite. Saurons-nous ouvrir les yeux ?  Aurons-nous le courage de la vie nouvelle ? De fait, plus que connaissance, la lumière nous plonge dans la Lumière, la claire vision de la Trinité qui n‘est que communion dans l’amour.

P. Francis

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